In Lakesh

13 02 2010

In Lakesh est une expression maya qui signifie ‘Je suis un autre toi’ ou encore: ‘Je suis toi’. Ce salut maya vient nous rappeler que nous sommes les maillons d’une immense chaîne: l’Humanité. Bien que chaque individu ait une évolution qui lui soit propre, l’évolution de l’espèce toute entière peut dépendre de celle d’un petit groupe.

Que nous le voulions ou non, nous sommes connectés les uns aux autres, ne serait-ce que par le fait de vivre sur la même planète. Que nous en soyons conscients ou non, nos actions quotidiennes peuvent avoir des répercussions sur des humains qui vivent à des milliers de kilomètres de nous.

 

Le cercle

Il y a quelques jours, nous avons participé à une cérémonie de célébration de la pleine lune. Au programme, une séance de Kundalini yoga, une cérémonie de guérison par la thérapie Homa et une soirée autour du feu accompagnée de chants et de danses.

Lorsque la cérémonie de guérison s’est terminée, le professeur de yoga nous a invités à nous placer en cercle, genoux contre genoux, le dos droit et les yeux fermés. Il fallait être au moins onze participants, nous étions environ une quarantaine. L’exercice consistait à répéter un mantra pendant onze minutes dans une dynamique d’appel et de réponse.

Le professeur commençait en disant le mantra à haute voix, avec confiance. Tous en choeur, nous devions répondre, en le répétant. Le professeur cédait alors la parole à la personne à sa gauche, en disant à voix basse: “sat nam”. Celle-ci lançait à son tour l’appel auquel nous répondions. Et ainsi de suite. Le mantra devait circuler dans le cercle, d’humain en humain, avec fluidité, s’harmonisant au rythme du djembé. À cela, s’ajoutait une consigne importante concernant l’énonciation du mantra wahe guru, qui symbolise l’extase, le passage de l’obscurité à la lumière. La première partie wahe devait être prononcée assez rapidement, en un temps. La deuxième partie devait quant à elle mettre l’accent sur le guuuuu et dire rapidement ru, le tout en deux temps. Le professeur de yoga, qui dirigeait l’exercice, a fortement insisté sur l’importance de respecter cette consigne. Il importait aussi de rester bien concentré pour agir lorsque venait son tour.

Le mantra commence son parcours. Les yeux fermés, nous écoutons l’appel et nous y répondons. Il est intéressant de noter la différence dans l’énergie et la confiance avec lesquelles il est lancé par les différents participants. Nous nous rendons compte rapidement que l’une des participantes éprouve de la difficulté à prononcer correctement le mantra, mettant systématiquement l’emphase sur le wa et prononçant wahe en deux temps. Néanmoins, le reste du groupe répond correctement à l’appel.

 

Mais que s’est-il passé?

Le mantra a parcouru le cercle trois fois de suite, passant de l’un à l’autre de façon harmonieuse. Peu après l’appel de la participante mentionnée précédemment, une autre jeune femme a commis la même erreur d’énonciation. Cette fois, lorsque nous avons répondu à l’appel, nous ne l’avons pas fait d’une seule et même voix. Certains ont répondu à l’appel tel qu’ils l’ont entendu, d’autres ont continué à le répéter tel qu’il nous avait été enseigné. “Sat nam“. La personne suivante a lancé l’appel en reproduisant l’erreur. C’est ainsi qu’à notre grande surprise, c’est un mantra déformé qui a commencé à se répandre le long du cercle.

Nous étions déstabilisés. Que fallait-il faire? Répéter le mantra erroné en choeur avec le reste du groupe tout en sachant que nous nous trompions? Ne pas répondre à ces appels? S’entêter à répéter le mantra d’origine, en contrastant avec la réponse générale? Seule cette dernière option nous a paru satisfaisante, sachant que quelque part dans le cercle quelqu’un d’autre tentait sûrement de maintenir l’axe. Le mantra continuait malgré tout à passer de participant en participant et à s’imposer de plus en plus au sein du groupe. À chaque nouvel appel, nous nous posions la question: cette personne allait-elle prendre l’initiative de rectifier la situation? Le mantra erroné a parcouru plus de la moitié du cercle avant que ce ne soit notre tour. Dans ce contexte, le simple fait de se rappeler du mantra enseigné demandait un effort supplémentaire. Nous étions assis côte à côte, et nous avons tous les deux prononcé le mantra d’origine. L’ensemble du groupe y a répondu correctement. “Sat nam“. La personne suivante est par contre revenue à la version erronée du mantra, à nouveau suivie par le groupe. Enfin, juste avant que les onze minutes ne se soient écoulées, un jeune homme a lancé haut et fort un appel qui sonnait enfin juste. Quelques participants plus tard, l’exercice s’est terminé, le mantra d’origine avait été rétabli juste à temps.

Tout le monde le fait... mais! - Mortimer - mortimeriadas.com - Tous droits réservés

 

“Parallèlôdrame”

Dans une certaine mesure, nous avons trouvé cette scène fort symbolique. En effet, nous avons fait un parallèle entre ce que l’on pourrait nommer le “phénomène du cercle” et la logique sociale dominante de nos jours.

Serait-ce possible que nous reproduisions inconsciemment les erreurs de nos voisins? Nous arrive-t-il de justifier nos actions, alors que nous savons à l’intérieur de nous qu’elle ne sont pas justes?

Comme nous l’avons mentionné, nous avons remarqué que nous nous sentions en harmonie avec le groupe lorsque nous prononcions le mantra tous ensemble, qu’il soit déformé ou non. Serait-ce la volonté de préserver cette harmonie qui nous pousse à fermer les yeux tout en se disant “après tout, tout le monde le fait”?

À la lumière de tout cela, il semble très important d’être conscients de l’impact de notre sphère d’influence (famille, cercle d’amis, collègues de travail)” sur nos pratiques quotidiennes. Voilà une nouvelle façon de voir le proverbe populaire: “Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu es”.

Bien souvent, lorsqu’un individu tente d’agir autrement, même sans l’affirmer ouvertement, il remet en question le système établi. Il sera parfois qualifié de rabat-joie, de rebelle, voire d’extrêmiste. Ne serait-ce pas un peu à l’image de cette voix qui s’élève pour rappeler le mantra d’origine? De cette voix qui nage à contre-courant?

 

Que pouvons-nous tirer de cette expérience?

Plus que des affirmations, cette expérience a soulevé en nous de nombreuses questions. Vos commentaires, plus que bienvenus, nous semblent nécessaires pour tirer profit de cet épisode.

  • Le parallèle que nous avons fait entre cette expérience de groupe et le fonctionnement général de la société vous paraît-t-il censé?
  • Comment aurions-nous pu éviter que l’erreur d’une seule personne se répande à l’ensemble du groupe?
  • Comment différencier ce qui nous est propre, notre vérité intérieure, de l’influence extérieure qui tente de s’imposer à nous?
  • Quelle serait la meilleure façon de mettre consciemment à profit le “phénomène du cercle”?
  • Que pensez-vous de la citation suivante?

L’homme raisonnable s’adapte au monde, l’homme déraisonnable s’obstine à essayer d’adapter le monde à lui-même. Tout progrès dépend donc de l’homme déraisonnable.” – George Bernard Shaw

 

Merci pour vos commentaires!


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2 responses

13 02 2010
Luiza

Je lis présentement un livre qui met beaucoup d’emphase sur le fait qu’on crée notre propre reailté à travers nos croyances, qui nous sont accesibles au niveau conscient, et donc qu’on peut modifier si on le voulait. Cette perception des choses me semble très plausible, et dans le cas de votre expérience, je dirai que chancun des lecteurs de votre article va l’interpréter de manière à faire ressortir ses propres croyances.

Vous deux partagez une philosophie très semblable, ce qui explique le fait que vous avez choisi de ne pas déformer le mantra, peu importe les comortements des autres. Si vous croyez que l’intégrité du mantra chanté est plus importante que l’harmonie ou l’uniformité du groupe, alors ce sera cette croyance qui prendra le dessus, en justifiant votre choix de reproduire le mantra original, tout en corrigeant le groupe.

D’autres membres du groupe metteront l’accent sur la connection qui se crée au sein du groupe lorsque les voix des participants s’unissent pour répondre à une seule voix, en respectant son appel, erroné ou non. Ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose, et ça démontre que chaque individu est unique dans son expression de ses croyances.

Maintenant j’analyse le tout à traves mon optique, et je suis influencée par une expérience personnelle. La première fois que je me suis assise dans un cercle pour chanter en sanskrit, j’étais très inquiète par rapport à la pronunciation correcte des mots, ainsi que la reproduction correcte des mélodies. Pourtant, on m’a expliqué que la partie la plus importante était que je chante et que je m’amuse en chantant, et que je ne devais pas m’acharner sur ce que je chantais en tant que tel. Par gêne, je n’ai presque pas chanté du tout ma première fois, malgré tous les encouragements chaleureux que j’ai reçu… Avec le temps et la pratique, j’ai realisé qu’effectivement, ce n’est pas important si on connait les mots ou non, ou si on fausse des notes ici et là, car la beauté de la chose est de se connecter aux autres dans le cercle du mieux qu’on peut, en s’ajustant à une fréquence semblable de vibration. Mais je dois vous avouer que pendant les premiers mois de chant sasnkrit, j’étais très heureurse d’avoir rencontré un ami qui connaissait les mantras et qui m’avait appris à les pronnoncer, ainsi qu’il m’avait expliqué leur significatinos… 🙂

Tout ça pour dire, je crois qu’il va de même dans la société. Souvent, on fait des choses dont est pas trop sûr, mais on veut essayer alors on les fait pareil. Il n’y a pas vraiment de bon ou mauvais choix, et lorsqu’on se lance dans quelquechose de nouveau, on active le processus d’essai et erreur. Dans votre cas, vous avez appri le mantra en partant, et il n’y a pas eu d’erreur qui s’est reproduit; dans le cas des autres qui l’ont mal prononcé, ils ne l’ont pas eu du premier coup, ce qui fait partie de leur cheminement d’apprentissage.

En résistant à comettre des erreurs lorsqu’il s’agit de quelquechose déjà aquit devient une responsabilité au niveau social, mais lorsqu’on est en apprentissage, répéter les erreurs des autres me semble tout à fait normal. 🙂

Aussi, je vous envoye le lien suivant, qui me semble intéressant et quelque peu relié à cette discussion! 🙂

❤ L 🙂

19 02 2010
lookingfortherainbow

Luiza,
Merci beacoup d´avoir pris le temps de nous donner ton opinion! Ton commentaire nous a aidé à mettre les choses en perspective. Cependant, dans notre cas, la personne qui dirigeait la session avait vraiment insisté sur la prononciation du mantra, nous faisant même pratiquer… C´est pour cela que nous avions de la difficulté à accepter la situation : )
Tu as tout à fait raison quand tu dis qu´on se sent plus en harmonie avec le groupe losqu´on prononce le mantra de la façon “dominante”, pour ainsi dire. C´est en effet ce qu´on a senti. Par contre, lorsque nous avons entendu le mantra d´origine rétabli, nous avons aussi eu un sentiment particulier de soulagement. Comme quand on sait que quelque chose doit être fait d´une certaine façon, et qu´après beaucoup d´essais on l´a finalement fait comme il le fallait.

Sinon, que penses-tu du parallèle entre cette situation et la dynamique sociale qui nous pousse parfois à faire des compromis envers nous même pour se sentir en hamonie ave les autres?
Avec beaucoup d´amour,
lisa et juan : )

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